Calendrier de l’Avent 2023 x Catherine Meurisse

Catherine Meurisse s’empare du calendrier de l’Avent À la Mère de Famille, notre 11e opus !

La dessinatrice-reporter, caricaturiste, illustratrice et autrice de bande dessinée, s’est laissée cueillir par la gourmandise et le récit de nos voyages dans les plantations de cacao. Son interprétation du calendrier de l’Avent est l’incarnation trait pour trait de son humour et de son amour pour la nature.

« À la Mère de Famille a une drôle de façon d’éduquer ses enfants : elle leur apprend comment attraper les dessinatrices et dessinateurs dans ses filets. Le procédé est simple : Steve (co-propriétaire de la Maison) vous invite innocemment à visiter sa boutique, rue du faubourg Montmartre, et vous met un panier dans chaque main. Puis il plonge la sienne dans les étalages de confiseries, brasse les pralinés, récolte les ganaches, ramasse les calissons, ratisse les pâtes à tartiner, racle les caramels, ratiboise les orangettes, et tout cela se déverse comme par miracle dans vos bras. Tout va très vite. Soudainement lestée de quelques tonnes de douceurs, étourdie de friandises, je n’ai pas réfléchi longtemps avant de répondre : D’accord, je veux bien illustrer le calendrier de l’Avent de 2023. »
Catherine Meurisse

Mère Nature et Mère de Famille

« Outre ce spectaculaire tour de magie, on m’a mise au parfum d’un autre tour : comment les fèves de cacao sont-elles choisies pour fabriquer les chocolats de la Maison ? Steve et sa famille m’ont raconté leurs périples en Inde (qui renvoi vers le billet) et en Amérique latine, les couleurs des cabosses et les odeurs dans les plantations, et c’est là que mon idée pour le dessin du calendrier a germé. Il me semblait intéressant de montrer les feuilles du cacaoyer et la faune qui s’y rattache. Rappeler qu’au départ, il y a une autre Mère, la nature, et que tout sort d’abord de son chapeau.

Sur les façades et le toit de la maison-calendrier, le voyage se fait autant à travers les pays qu’à travers les saisons : les cabosses et les papillons de sous l’équateur sont rhabillés pour l’hiver, Noël oblige ; la mythologie du sud se mélange à celle du nord. L’aventure se termine fatalement sur la langue, quand tous les chocolats y auront fondu, au soir du 24 décembre. Bonne nouvelle, le tour reprend l’année suivante ! »

CMeurisse-©NicolasTrouillard

À propos de Catherine Meurisse

Née en 1980, après un cursus de lettres modernes, Catherine Meurisse fait ses études à l’école supérieure des arts graphiques Estienne puis à l’École nationale supérieure des arts décoratifs à Paris.

En 2001, parce qu’elle gagne le premier prix d’un concours scolaire de dessin de presse, l’équipe de Charlie Hebdo lui tend les bras. Le journal Les Echos l’accueille en même temps, permettant à la jeune dessinatrice de s’exercer au grand écart. Le virus du dessin satirique est contracté. A l’aube de ses 25 ans, Charlie Hebdo l’embauche pour de bon ; elle y travaillera pendant douze ans comme dessinatrice-reporter et caricaturiste. A ses côtés, les plus féroces dessinateurs de presse : Cabu, Wolinski, Charb, Luz, Riss, Tignous, Honoré, Jul, Willem. Forte des leçons de ces insolents, elle impose son style spontané dans de nombreux journaux (Le Monde, Libération, Les Échos, L’Obs, Télérama, Causette…) et mène en parallèle le métier d’illustratrice pour la jeunesse, dans des magazines (Okapi, Astrapi…) comme dans l’édition (Bayard, Gallimard jeunesse, Nathan…). Aux métiers de caricaturiste et d’illustratrice s’ajoute rapidement celui d’autrice de bande dessinée.

Crédit photo ©Nicolas Trouillard

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Dans les albums qu’elle réalise, mêlant le plus souvent l’art et littérature, l’esprit de sérieux n’a pas sa place. Après Mes hommes de lettres, Le Pont des arts et Moderne Olympia, qui invitent peintres et écrivains célèbres à descendre de leur piédestal et entrer dans la danse des muses et des musées, après Savoir-vivre ou mourir, récit hilarant d’un stage d’intégration à l’Académie des bonnes manières de Nadine de Rothschild, après Drôles de femmes, série de portraits de comédiennes et d’artistes qui ont fait de l’humour leur territoire (Florence Cestac, Anémone, Yolande Moreau, Dominique Lavanant… Avec Julie Birmant au scénario), elle signe en 2016 La Légèreté, récit bouleversant de son retour à la vie, au dessin et à la mémoire, après l’attentat contre Charlie Hebdo auquel elle a échappé. Moteur de ce livre, la quête de beauté l’invite à réapprendre à dessiner et à écrire. Cet album signe la fin de son activité de caricaturiste. Elle quitte définitivement la réaction de Charlie, décide de s’éloigner de l’urgence de l’actualité pour se consacrer au temps long de la bande dessinée, retrouver le temps et l’espace de la rêverie. L’humour est indispensable à sa reconstruction. Après le burlesque Scènes de la vie hormonale, elle publie Les Grands Espaces, évocation de son enfance à la campagne où se mêlent souvenirs savoureux et conscience politique du paysage abîmé par l’agriculture intensive. Dans ses bandes dessinées, nature et culture sont perméables ; les arbres sont une tribu vigoureuse dont nous avons tout à apprendre, selon Marcel Proust.

En 2019 parait Delacroix, adaptation illustrée des mémoires d’Alexandre Dumas, grand ami du peintre Eugène Delacroix. Cet album la met sur le chemin de l’Académie des beaux-arts. Elue le 15 janvier 2020 en section Peinture, elle fait entrer la bande dessinée pour la première fois à l’Institut de France. Désormais Immortelle mais gardant les pieds sur terre, elle publie en 2021 La Jeune femme et la Mer, récit initiatique qui interroge notre capacité à entrer en résonance avec la nature. Cet album s’inspire de sa résidence à la Villa Kujoyama à Kyoto. L’an dernier, elle a signé l’illustration des Fables de La Fontaine (éditions Ron-Grand Palais), ainsi que Humaine, trop humaine (Dargaud), une bande dessinée qui ébranle avec humour les codes de la pensée philosophique.

Une grande exposition rétrospective, Catherine Meurisse, la vie en dessin, lui a été récemment consacrée à la Bibliothèque publique d’information du Centre Beaubourgainsi qu’au Cartoonmuseum de Bâle, puis au Musée Ungerer – Centre international de l’illustration de Strasbourg. Elle est représentée par la galerie Barbier à Paris et par la galerie Philippe Labaune à New York. Officier des Arts et Lettres, elle n’a pas encore pris le temps de se procurer sa médaille, trop occupée à dessiner.